Le parasitisme se définit comme « le comportement par lequel un agent économique s’immisce dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans bourse délier, de ses efforts et de son savoir-faire ».
Dans cette affaire, la société CELINE, du groupe LVMH, spécialisée dans la fabrication et la commercialisation de prêt-à-porter et de maroquinerie de luxe, reprochait à la société française MANGO France, et espagnole PUNTO FA (société mère), d’avoir commis des faits de concurrence déloyale et parasitaire en vendant entre juin 2017 et janvier 2023, 24 de ses modèles (7 modèles de lunettes, plusieurs modèles de bijoux, 12 modèles de sac, 1 modèle de portefeuille, 1 modèle de botte et 1 modèle de ceinture).
La société CELINE invoquait des faits de parasitisme, sanctionnés par l’article 1240 du Code civil, qui supposent pourtant la démonstration d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité entre les deux, réputés plus difficile à démontrer que la contrefaçon de droit d’auteur.
Ce dernier fondement aurait, en réalité, eu peu de chance de prospérer en l’espèce, la comparaison des modèles en cause, repris individuellement n’étant pas en soi fautive.
Ce sont ainsi les circonstances entourant la commercialisation des modèles litigieux qui ont justifié la condamnation au titre du parasitisme.
La société CELINE s’est attachée à démontrer, non pas la copie ou l’imitation de tel ou tel modèle repris individuellement relevant de la contrefaçon, « mais un comportement global de suivisme en accumulant les reprises de ses modèles dans le but de permettre à la clientèle de se constituer, à moindre coût, une garde-robe CELINE ».
La société CELINE a, par ailleurs, justifié d’une valeur économique individualisée sur ses produits, tenant à un directeur artistique renommé, des équipes de créateurs et d’importants budgets globaux pour sa communication, la promotion de sa marque et ses défilés.
Cette stratégie a été payante puisque le Tribunal de commerce fait droit, le 20 septembre 2021, aux demandes de la société CELINE en lui allouant 1.500.000 euros en réparation des préjudices économique et moral.
La cour d’appel de Paris confirme le jugement de première instance en octroyant des dommages et intérêts à hauteur de 2.000.000 euros, en relevant :
- La répétition de la commercialisation par MANGO des produits très inspirés des modèles phares de la célèbre enseigne CELINE,
- La concomitance de leur commercialisation après la présentation des modèles de la société CELINE lors de défilés, de leur lancement ou de leur mise en avant dans la presse,
- L’appartenance à la même collection, caractérisant un effet de gamme.
L’ensemble de ces éléments ne pouvait être fortuit, puisqu’il tendait à « générer une évocation des produits CELINE dans l’esprit de la clientèle, et ainsi à profiter sans bourse délier des investissements et de la notoriété des articles de la société CELINE », et ce « indifféremment de la réussite commerciale » des modèles MANGO.
Pour évaluer le préjudice à 2.000.000 euros, la cour prend en compte l’avantage concurrentiel procuré aux sociétés MANGO qui ont fait l’économie des investissements intellectuels, matériels ou promotionnels de la société CELINE ainsi que du préjudice moral subi par cette dernière résultant de l’atteinte à sa réputation et son image fondée sur le luxe et l’exclusivité.